Le jambon sec des Ardennes

Ce jambon sec assez méconnu fait partie du cercle fermé des jambons secs de haute qualité Made in France, tel que le jambon de Bayonne, le porc noir de Bigorre, ou le jambon corse. Rendons-nous dans les Ardennes pour rencontrer des artisans charcutiers et découvrir son mode de fabrication…

Jambon sec des Ardennes
Jambon sec des Ardennes Aux Saveurs d’Ardennes, à La Francheville

Un petit rappel historico-géographico-socio-économique : jusqu’au milieu du XXème s., le cochon était roi, dans les Ardennes. C’est lui fournissait le seul aliment carné dans la nourriture du paysan, chaque ferme en tuait un ou deux par an, et consommait durant toute l’année cette viande, séchée et suspendue aux poutres de la cuisine et du grenier. Le climat des Ardennes favorisait ce mode de conservation : le salage était réalisé lors des mois froids ; le relief d’altitude moyenne et les vents des Ardennes favorisaient la maturation des jambons. Il faut attendre les années 1970 pour que ce jambon soit reconnu au niveau national, sous l’impulsion d’un artisan charcutier, Maurice Roffidal, et les efforts médiatiques de la Confrérie du jambon sec des Ardennes. Un travail récompensé par l’obtention de l’IGP en 2001, définissant les règles de fabrication de cette spécialité charcutière (voir cahier des charges à la fin de l’article).

Jambon sec des Ardennes
Jambon sec des Ardennes Aux Saveurs d’Ardennes, à La Francheville Confrérie du Jambon sec, avec, de droite à gauche : Janique, Danielle, Didier Villemin (le charcutier), Michel, Jean-Pierre (le Grand maître), Charles, et Maurice

Des porcs bien élevés

Frédéric Lorriette, patron des Salaisons de Haybes, a justement racheté son entreprise de salaisons à Maurice Roffidal en 2010. Il nous ouvre les portes de son atelier avec fierté, désireux de montrer son savoir-faire et la qualité de son produit. La matière première, d’abord : une cuisse entière fraîche de cochon (à l’exclusion de verrats et de coches), sans obligation de provenance. Mais les bons charcutiers préfèrent acheter la viande de porcs élevés dans la région, par des éleveurs qu’ils connaissent. Tels le GAEC de la Basse-Warby, un élevage situé un peu à l’ouest de Charleville-Mézières. Solweig Eudier explique pendant la visite que les porcs sont nés sur l’exploitation, et qu’ils sont nourris avec un aliment sans antibiotiques, à partir de céréales issues de leurs récoltes. Les bâtiments sont propres, aérés, les cochons sont également propres et apparemment pas stressés et bien soignés… Le genre de bêtes saines et bien nourries dont Frédéric apprécie la viande.

Moins de sel, plus de goût

Peu d’opérations sont nécessaires pour la préparation du jambon sec, mais elles nécessitent toutes un savoir-faire artisanal, qui fait toute la différence avec un processus industriel. Après avoir paré les cuisses, et éventuellement les avoir désossées puis recousues et pressées pour quelles retrouvent leur forme d’origine, la viande est massée et frottée avec un mélange de sel, de poivre et d’épices, avec aussi un peu de nitrate de potassium pour garder au jambon sa teinte rosée et assurer sa conservation. Rappelons que les jambons industriels sont plongés dans des bains de saumure, ou injectés d’eau salée… Les jambons sont gardés au frais (3 à 5 °C) dans une salle au taux d’humidité supérieur à 80 %, pendant trois mois, pendant lesquels, selon la méthode de l’artisan, ils sont à nouveau frottés de sel une ou deux fois. Didier Villemin, autre charcutier réputé, à La Francheville, confirme que cette étape est fondamentale : « cette période de repos permet au sel de pénétrer à cœur dans le jambon, sans le surcharger en sel. Depuis 20 ans, nous avons baissé la teneur en sel de 20 g au kg à 16 g/kg environ, pour suivre le goût du consommateur et les recommandations des médecins… » Puis, après avoir recouvert le jambon d’une couche de graisse, pour éviter que la surface ne sèche trop vite, les jambons sont suspendus dans un séchoir climatisé où l’on alterne les cycles d’air chaud et d’air froid, en ayant la volonté de reconstituer les conditions climatiques naturelles constatées dans les séchoirs à salaison des fermes. C’est la période d’affinage ou de mûrissement, qui peut durer de 7 à 12 mois.

 

Une noix de jambon, et pas un jambon à la noix

L’artisan charcutier peut aussi choisir de préparer séparément les trois muscles constituant chaque cuisse : la noix ou noix du dessus, la sous-noix ou noix du dessous et la noix pâtissière. La préparation est à peu près la même, avec un processus plus rapide, bien entendu, puisque leur poids est moindre. La sous-noix et la noix pâtissière sont mises en boyau et présentées sous une forme arrondie et allongée. La noix est mise en filet et garde une forme de poire. Ces noix de jambon sont appréciées pour leur finesse et leur faible teneur en graisse.

Jambon sec des Ardennes
Jambon sec des Ardennes Aux Saveurs d’Ardennes, à La Francheville Noix de jambon sec

Vient l’étape finale, la dégustation ! Son excellente tenue permet de découper aisément de fines tranches en chiffonnade. L’affinage long confère à la viande un moelleux et un fondant en bouche très agréable, le sel est discret et soutient les saveurs carnées de viande séchée, voire légèrement fruitées. Un régal ! A consommer nature, sur un bout de pain, ou avec du melon. Si vous achetez un jambon entier, il faut l’entourer d’un linge sec en couvrant la partie entamée avec du saindoux ou du beurre, et le conserver dans une pièce fraîche pas trop humide. Les petites noix peuvent se conserver dans le bas du frigo. Au niveau des prix, un jambon entier avec ou sans os se trouve sur place aux alentours de 120 € pièce. Mais on peut aussi ramener un quart de jambon sec d’1,5 kg pour une trentaine d’euros et une noix de jambon sec d’1 kg pour une vingtaine d’euros…

Jambon sec des Ardennes
Jambon sec des Ardennes Aux Saveurs d’Ardennes, à La Francheville Didier Villemin dans sa salle d’affinage, contrôle le séchage de ses jambons

Anecdote amusante : Didier Villemin, le charcutier de La Francheville, est si fier de ses jambons, qu’il a tenu à nous amener sur la place ducale de Charleville-Mézières pour faire une photo de l’un de ses jambons. Une façon de signifier que ce jambon sec fait partie des emblèmes des Ardennes, que c’est un patrimoine gastronomique qui valorise la région, à l’instar de cette place du XVIIème s., jumelle de la place des Vosges…

Jambon sec des Ardennes
Jambon sec des Ardennes Didier Villemin, montre un beau jambon sec sur la place Ducale, à Charlevile-Mézières

 Attention : le jambon sec des Ardennes est une salaison au sel sec de jambon cru, à ne pas confondre avec le jambon d’Ardenne, qui est un jambon fumé, produit en Belgique !

Le cahier des charges de l’IGP

Les produits sous IGP Jambon sec des Ardennes de l’IGP Noix de Jambon sec des Ardennes répondent à certaines exigences:
– Les jambons et les noix sont fabriqués dans l’aire correspondant au département des Ardennes.
– Ils sont fabriqués exclusivement à partir de porc frais sélectionné (pas de congelé)

– Le salage est manuel et réalisé par un frottage au sel sec.
– La durée de fabrication et d’affinage des jambons est de 360 jours minimum à partir de la mise au sel, de 120 jours minimum pour les grosses noix et 45 jours pour les noix pâtissières.

Où l’acheter ?

Peu de chances d’en trouver dans un supermarché, à part dans la région Champagne-Ardenne…

Aux Saveurs d’Ardennes dispose d’une boutique dans la ZAC du Grand Ban, à La Francheville, et propose également de la VPC : Aux Saveurs d’Ardennes

Jambon sec des Ardennes
Jambon sec des Ardennes Aux Saveurs d’Ardennes, à La Francheville Jambon sec entier

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