Road trip dans le sud du Portugal

Avec l’épatante Lisbonne en entrée, les villages blancs de l’Alentejo comme plat principal et les magnifiques plages de l’Algarve en dessert, le sud du Portugal constitue un véritable gueuleton pour tout voyageur friand de bonnes et belles découvertes. A consommer sans modération, sauf en juillet-août, pour éviter l’indigestion et le coup de chaud…

Dès que les orangers fleurissent, c’est-à-dire en avril, comme mus par un héliotropisme synchrone, les touristes commencent à affluer sur la côte méridionale du Portugal. Plutôt que de se précipiter en Algarve et de lézarder sur ses plages, je conseille de louer une voiture ou un camping-car, de partir de Lisbonne, de traverser l’Alentejo, et de rejoindre l’Algarve des plages buissonnières, afin de découvrir le meilleur du sud du Portugal sans avoir à pâtir des inconvénients du tourisme de masse.

Lisbonne et Sintra

Campée sur la rive droite de l’estuaire du Tage, Lisbonne est une ville fascinante dans laquelle il faut passer au moins deux jours. Préparez-vous à beaucoup marcher, car même si l’on utilise le métro, les autobus, les tramways, ou les funiculaires qui partent à l’assaut des pentes les plus raides de la ville, on se retrouve forcément à grimper des raidillons pour trouver telle église, tel musée ou tel bar à fado. Mais c’est ainsi qu’il faut visiter Lisbonne, en laissant une chance au hasard de vous faire découvrir ce qui n’est pas indiqué dans les guides. L’avantage des villes construites sur des collines, c’est qu’elles ménagent de nombreux belvédères. Lisbonne n’en manque pas et ce sont toujours des lieux de halte agréable, tel le Largo das Portas do Sol, où il faut aller en fin d’après-midi, lorsque le soleil donne de belles teintes chaudes aux maisons de l’Alfama, et qu’il projette sur l’estuaire du Tage des reflets dorés, surnommé à cause de cela la Mer de Paille… Même s’il est excentré, n’oubliez pas le quartier de Belém. Vous visiterez le monastère dos Jeronimos, fleuron de l’architecture manuéline, l’imposant monument des Découvertes, ainsi que la célèbre tour de Bélem, symbole de la puissance navale du Portugal. Faites aussi une halte à la Confeitara do Bélem, pour faire provision de ces délicieux pasteis de nata sortant tout chaud du four !

A une dizaine de kilomètres des derniers faubourgs de la ville, s’étirent déjà de belles plages et des lieux de villégiature appréciés des Lisbonnais : Estoril, la station balnéaire huppée avec son Casino ; Cascais ; Guincho, dont l’immense plage de sable fin, exposée aux rouleaux de l’Atlantique, attire surfeurs et véliplanchistes… Mais l’attrait principal de cette région, c’est Sintra, classée au Patrimoine mondial par l’UNESCO. Cette jolie ville noyée dans une forêt au cœur d’une petite chaîne montagneuse, jouit d’une situation et d’un climat qui l’ont fait apprécier des rois, des artistes et de l’aristocratie du pays. Pas étonnant qu’on y trouve tant de villas luxueuses et de palais somptueux ! Si vous ne deviez en visiter qu’un, choisissez celui de Pena, il est extraordinaire : imaginez, perché sur un piton rocheux, un palais un peu fou, un château de conte de fée qui se pare de couleurs chatoyantes et dont l’architecture marie les styles les plus hétéroclites. Si la façade étonne, l’intérieur éblouit par le raffinement de la décoration, d’inspiration mauresque, et par la beauté du mobilier ancien. Quant au parc, on s’y promènerait toute une journée, au milieu des fougères arborescentes, des séquoias géants et du jardin des camélias…

Les trésors cachés de l’Alentejo

L’Alentejo est un immense plateau agricole, faiblement peuplé, au climat rude, froid l’hiver et torride l’été. On y trouve des bourgs et des cités comptant parmi les plus séduisantes du pays. Et ses champs de blé ondoyant, ses collines plantées de chênes-lièges, d’oliviers ou de vigne, dessinent des paysages sublimes de simplicité et de pureté. Evora, est une ville-musée qui abrite dans ses remparts de nombreuses églises et monuments, dont les ornementations architecturales révèlent l’art mudéjar (inspiré de la culture hispano-arabe). Vous y admirerez aussi un temple romain, juste en face d’une église possédant de magnifiques panneaux d’azulejos. Les murs de la chapelle des Ossements, jouxtant l’église Sao Francisco, sont recouverts, eux, d’os et de crânes humains… Prenez un verre à la terrasse d’un café de la Praça do Giraldo, la grande place à arcades de la ville, agrémentée d’une belle fontaine en marbre blanc et rose. De qualité comparable à celui de Carrare, ce marbre provient de la région d’Estremoz, petite ville située à 44 km d’Evora. On peut voir ses très impressionnantes carrières sur la N4 en direction d’Elvas. Le marbre est présent partout dans la région, puisqu’il a été employé pour édifier le cœur de la ville Renaissance de Vila Viçosa, les piloris et les fontaines des villes voisines, une bonne part du quartier médiéval d’Estremoz, et même les bases et les chapiteaux du temple romain d’Evora. La petite ville de Borba se paie même le luxe d’avoir ses trottoirs pavés de marbre rose ! Avec la poterie d’Estremoz, les tapis d’Arraiolos, les objets en liège ou en marbre, sans oublier le fromage de Serpa et les vins rouges de Reguengos de Monsaraz, considérés comme les meilleurs du Portugal, les occasions ne manquent de ramener des souvenirs ou des spécialités de cette belle région.

Dans le sud du Portugal, les gens ont l’habitude de chauler les murs de leurs maisons, rendant leurs villages éblouissants de blancheur. Les soubassements et les ouvertures sont parfois peints en rouge, bleu ou ocre, donnant encore plus de charme à ces villages, qui se détachent sur l’azur profond du ciel. Chacun fera son propre hit-parade des plus beaux villages blancs de l’Alentejo, mais j’avoue avoir un faible pour Monsaraz, minuscule village fortifié au sommet d’une butte, près de la frontière avec l’Espagne. Entre ses remparts, il n’y a qu’un donjon, trois rues et quelques dizaines de maisons, mais l’unité architecturale, la simplicité et la beauté des matériaux – le grès et la chaux – laissent une impression de grande harmonie. De plus, il règne un calme absolu dans ce village oublié, et l’on reste un long moment assis sur un banc, à profiter de cet intense moment de sérénité immaculée. D’aucuns pourront préférer Moura, village thermal au quartier maure très bien conservé, et dont les nefs de l’église sont entièrement tapissées d’azulejos polychromes du XVIIe siècle ; Mourao, dont les curieuses cheminées rondes et ajourées ressemblent à de petits minarets ; ou Mertola, superbement lové dans un méandre du fleuve Guadiana.

L’Algarve de plage en plage

Sans vous en rendre compte, vous passerez en Algarve. Les cigognes non plus ne font pas ce genre de distinction, qui font leurs nids aussi bien sur une cheminée alentéjane que sur un clocher algarvien. A Faro, elles nichent même en plein centre-ville, et un couple élit régulièrement domicile au-dessus de la plus belle porte des remparts de la vielle ville ! Sans doute sont-elles attirées par la proximité du parc naturel de Rio Formosa, vaste étendue sauvage et marécageuse qui s’étend sur toute la partie orientale du littoral de l’Algarve. Un centre d’information organise des randonnées pédestres dans cet univers aquatique pullulant d’oiseaux. Même si vous n’êtes pas férus d’ornithologie, c’est une balade très agréable à faire, et vous aurez peut-être la chance de voir un spécimen de la seule espèce de caméléon vivant en Europe ! Cette lagune est séparée de la mer par un cordon dunaire sur lequel s’appuie une magnifique plage de sable fin. On y accède par bateau depuis l’embarcadère de Quatro Aguas. En fait, le littoral de l’Algarve – c’est ce qui fait son succès – n’est qu’une immense plage, entrecoupée çà et là de falaises. Des stations balnéaires sans grâce en bétonnent une partie (Albufeira, Quarteira, Armaçao do Pera…), mais les accès à la mer sont assez nombreux pour que chacun puisse poser son carré de serviette et profiter d’un coin de ciel bleu dans une relative tranquillité, surtout hors saison. Mais l’intérêt de l’Algarve ne se limite pas aux plaisirs balnéaires. Tavira, avec ses maisons aux toits à quatre versants, façon temple chinois ; Silves, avec son château maure ; Faro et Lagos, avec leur pittoresque vieille ville ceinte de remparts, ne manquent pas de charme. Vous partirez à la découverte des trésors culturels contenus dans leurs musées, palais et églises, avant de parcourir les marchés et les poissonneries à la recherche des bons produits locaux. Entre Faro et Loulé, faites un petit détour par Almansil pour visiter l’extraordinaire chapelle Sao Lourenço. C’est un joyau du baroque portugais, l’une des plus belles du pays. L’intérieur est entièrement recouvert d’azulejos bleu et blanc, donnant l’impression qu’on se trouve « au plus haut des cieux » ! Et puis il reste encore quelques jolis villages que les promoteurs n’ont pas réussi à défigurer : Carvoeiro sans doute protégé par les falaises qui l’encadrent, et surtout Ferragudo et Salema, villages de pêcheurs qui laissent sur la plage leurs barques colorées. A partir de Lagos, l’urbanisme cède du terrain et le littoral redevient sauvage, jusqu’à la péninsule, Sagres, d’où partaient jadis les explorateurs portugais à la découverte des océans. La côte s’élève ici en de hautes falaises, dessinant des paysages somptueux, comme à Ponte da Piedade, où l’ocre des pitons rocheux s’accorde si bien avec le vert émeraude de la mer. Tout le jeu consiste à trouver une faille accessible dans cette muraille, avec comme récompense une merveilleuse petite crique, comme à Boca del Rio. Mais avec la désagréable surprise, parfois, de constater que la place est déjà prise… Ceux qui pourront vous renseigner le mieux, ce sont les pêcheurs de la région. Ils connaissent la côte comme leur poche, mais eux, ce ne sont pas les criques qu’ils recherchent, mais les plus hautes falaises ! Celles au-bas desquelles les furieux assauts de la houle brassent la mer en faisant jaillir des geysers d’écume. C’est là que ces pêcheurs-acrobates pêchent à la ligne, penchés au bord du vide. On peut les approcher vers le fort de Sagres, mais gare au vertige !

Retour vers Lisbonne

La façade ouest de l’Algarve est très sauvage et très peu construite. Il faut dire qu’ici la mer est refroidie par le Gulf Stream, et la houle, poussée par des vents violents, provoque de gros rouleaux sur les plages, qui ne sont guère fréquentées que par les surfeurs. Il faut alors emprunter au hasard les chemins en terre qui mènent au rivage, pour découvrir d’immenses plages désertes et sauvages, telles que Castelejo, Amado, Carrapateira, Arrifana ou Odeceixe. A partir d’Aljezur, ou même depuis Portimao, allez vous promener dans la Serra de Monchique, région montagneuse d’origine volcanique dont les sources d’eau chaude sont utilisées dans une station thermale, Caldas de Monchique. Sur les routes tortueuses de ses collines plantées de chênes-lièges, de pins et d’eucalyptus, vous serez séduits par l’accueil naturel des habitants, qui conservent dans ces montagnes un mode de vie très rural et traditionnel. Pensez à faire emplettes de miel et de pâte d’amande, les spécialités de la région. Toujours plus au nord, prévoyez de faire étape à Porto Covo et Vila Nova de Milfontes, ou au bord d’une des superbes plages qui se succèdent jusqu’à Comporta. De là, vous aurez le choix de faire le tour de l’estuaire du Sado, petite Camargue portugaise dont les balades pédestres menant à des hameaux de pêcheurs aux maisons au toit de chaume, permettent d’observer une faune variée. Sinon vous prendrez le bac à Troia qui mène en vingt minutes à Setubal, important port de pêche et ville industrielle. Ce qui ne signifie pas qu’il faut la fuir, au contraire ! Garez-vous près du port et baladez-vous dans les ruelles piétonnes du centre, pour acheter par exemple du Moscatel, l’apéritif local. Puis, rendez-vous au marché couvert (tous les matins sauf lundi), pour voir le coin des poissonniers, étalant tout ce que la mer contient de comestible, dont des espèces de poissons ou crustacés étonnantes, jamais vues en France. Avant de reprendre l’autoroute qui ramène à Lisbonne, faites encore un détour par la Serra de Arrabida, magnifique forêt à la végétation exubérante, dont la route des crêtes, fraîche et bucolique, offre des panoramas magnifiques. Et si vous n’êtes pas encore saturés de belles images, allez jusqu’au Cabo de Espichel, langue de terre désertique tombant en à-pic au-dessus de l’océan, sur laquelle la Vierge serait apparue en 1200. Sur ce cap du bout du monde fouetté par les vents, d’une beauté à couper le souffle, je n’ai pas eu une apparition, mais une certitude : celle d’avoir fait un superbe road-trip !             

Les azulejos portugais

Introduits par les Maures au XVe siècle, les azulejos (de l’arabe az-zoulaïj) sont des carreaux de faïence émaillée, qui constituent l’art national par excellence, et le livre mural de la mémoire portugaise. Souvent bleu ou jaune, avec des motifs géométriques ou des scènes de la vie quotidienne, ils ornent les façades et l’intérieur des maisons, mais aussi les fontaines et les monuments les plus divers. Les plus beaux panneaux ont été dessinés par des artistes des siècles passés et représentent des scènes de cour, de chasse ou de guerre dans les châteaux, ou la vie des saints dans les églises. Ce sont de véritables œuvres d’art que vous admirerez tout au long du voyage. A Lisbonne, ne manquez pas de visiter le musée national des azulejos, le superbe Palacio Fronteira (dans le parc de Monsanto, non loin du camping), et la fabrique artisanale Sant’Anna (Caçalda da Bora Hora, 96), à Belem, dont on peut visiter les ateliers.   

Bonnes adresses gourmandes

Les Portugais ont un penchant pour les petites douceurs sucrées, et les cafés et les pastelerias regorgent de petits gâteaux qui se dégustent à toute heure. Voici quelques-unes des meilleures adresses où trouver ces péchés mignons :

  • Confeitaria de Belem : rua de Belem, 84.
    Réputée depuis 1837 pour le pasteis de nata, petit flan sur pâte
    feuilletée saupoudré de cannelle et de sucre glace. https://pasteisdebelem.pt/fr/
  • Casa Piriquita, à Sintra, tout près du Palais
    National. Ici sont fabriqués à l’ancienne les queijadas, petits
    gâteaux ronds à base de fromage blanc et de cannelle, et les travesseiros,
    pâte feuilletée fourrée de confiture de melon.
  • Casa Paixao : à Serpa, en face de l’office de
    tourisme : minuscule fabrique artisanale de queijadas,
    succulentes tartelettes au fromage blanc sucré.
  • Casa de doces regionais Taquelim Goncalves :
    en face de la Poste, rua da Porta de Portugal, à Lagos : pour goûter
    aux vieras, petits gâteaux à base d’œuf et de pâte d’amande.
  • Pastelaria Capri : largo da Misericordia, dans
    une rue piétonnière de Setubal : pour goûter aux oranges confites
    sucrées.

Et pour un repas complet :

  • Adega do Isaias : rua do Almeida, 21, à
    Estremoz : ancienne cave à vin reconvertie en auberge. Pour déguster
    sur de grandes tables en bois l’authentique cuisine alentéjane dans une
    ambiance très conviviale.
  • Marisqueira Capelo : sur le front de mer de
    Santa Luzia, vers Tavira. Excellent restaurant de poissons et de fruits de
    mer, où le patron grille sous vos yeux le poisson que vous avez vous-même
    choisi.
  • Baluarte do Sado : derrière le marché, vers le
    port de Setubal. Restaurant populaire où le poisson ne peut pas être plus
    frais ! En face, grand parking très pratique pour faire un tour dans
    le marché couvert de Setubal.

Les étapes pour camping-car

Hors saison, le camping sauvage ne semble pas poser de problème en Alentejo ni même en Algarve, où la police tolère les camping-cars sur les parkings situés aux abords des villes. Il est souvent possible de se regrouper à plusieurs pour passer la nuit près des plages (voir bons plans). Pour ceux qui préfèrent le confort et la sécurité du camping, voici quelques bonnes adresses (les bons campings font souvent partie de l’association Orbitur   https://www.orbitur.pt/fr ) : Lisbonne (parc de Monsanto) ; Guincho ; Evora ; camping municipal de Serpa ; Quarteira ; Praia da Luz ; Sagres.

Pour avoir la liste de tous les campings, consulter www.roteiro-campista.pt

Les bons plans

  • A Sintra, se garer Volta do Duche, près du parque do Liberdade, en face d’une immense fontaine tapissée d’azulejos.
  • A Evora, se garer sur le grand parking situé au bas des remparts, en face de la rua da Republica.
  • A Monte Gordo, près de Vila Real de Santo Antonio, passer la nuit au bord de la plage, près d’un petit restaurant qui permet de prendre des douches.
  • Juste après Monte Gordo, sur la route de Tavira, essayer de trouver une place sous les pins au bord de la très belle plage Adao e Eva.
  • A Tavira, aller sur le parking de la base nautique, situé à deux pas de l’embarcadère pour l’île de Tavira. Non loin, lavomatic, WC, et borne robinet au restaurant Quatro Aguas. Vous pouvez aussi essayer le parking de Pedras del Rei, à Santa Luzia, où un petit train vous mènera aux superbes plages de l’île de Tavira.
  • Vers Quarteira, les plages de Loulé Velho ou de Trafal sont bordées de superbes pinèdes. Accès par piste en terre. Très peu fréquenté.
  • Entre Burgau et Sagres, aller à Boca del Rio : un petit paradis !
  • Vers Carrapateira, essayer le parking en terre face à la sublime plage d’Amado. Beaucoup de vagues.
  • A Vila Nova de Milfontes, parking-belvédère situé au-dessus de la baie formée par l’estuaire du Rio Mira. Un escalier mène à la plage.
  • A Porto-Covo, parking situé au bord de la mer, avec de nombreuses criques enchâssées entre les rochers.

A noter :

– ces « bons plans » datent de plus de 10 ans, et je ne garantis pas leur pérennité.  Si d’aventure vous allez sur place et que la nuitée n’est plus possible à un endroit, dites-le moi !

– Ce road-trip est un circuit d’environ 2000 km, à faire en 3 semaines minimum.

Se renseigner : www.visitportugal.com

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