Yukon, au fin fond du Canada

Situé à l’extrême nord-ouest du Canada, à la frontière de l’Alaska, le territoire fédéral du Yukon se distingue par ses immensités sauvages et ses splendides paysages de montagnes, de forêt et de toundra. Connu pour avoir été le théâtre de la ruée vers l’or du Klondike, au début du siècle, le Yukon offre ses grands espaces aux amateurs de nature et d’aventure.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : sur un territoire aussi vaste que la France, le Yukon compte environ 38 000 habitants, dont les deux-tiers résident à Whitehorse, la capitale, l’une des seules villes dignes de ce nom. Le reste se répartit dans de petites communautés, le long des 11 routes que compte cette province canadienne. C’est dire que le reste du territoire est pratiquement vierge, et qu’on a plus de chance de rencontrer un ours ou un orignal qu’un trappeur au bord des lacs ou dans les forêts touffues. D’ailleurs, il a été édité un petit guide à l’intention des visiteurs, indiquant ce qu’il faut faire si l’on tombe nez à truffe avec un ours noir ou un grizzli. Heureusement pour le journaliste et hélas pour le photographe, je n’ai pas croisé le chemin d’un grizzli lors de ce voyage…

Whitehorse, capitale du Yukon

Après un voyage éprouvant, vous atterrirez à Whitehorse, la capitale du Yukon. 25 000 habitants, dont 4000 francophones. Cette petite ville représente environ 70 % de la population de la province, c’est dire si le reste du territoire est inhabité ! Une heure après être arrivé, Whitehorse vous aura déjà donné les clefs pour comprendre le Yukon. Dans le hall d’entrée de l’hôtel Gold Rush Inn, vous serez accueillis par des trophées de chasse et des animaux sauvages empaillés : c’est dire l’importance de la faune sauvage dans cette province. Dans la rue commerçante principale, la seule statue est celle d’un prospecteur minier du début du siècle dernier. On comprend comment est née la ville. Plusieurs magasins proposent de l’équipement outdoor (vêtements, matériel de trekking ou de chasse…), impliquant le fait que l’on vient au Yukon principalement pour profiter de sa nature. Enfin, vous trouverez aussi pas mal d’artisanat indien ou inuit, ce qui traduit l’importance des communautés autochtones dans cette province, où elles sont bien intégrées à la communauté. Dès que l’on sort de la ville, on se rend compte que la nature est identique à celle qu’ont connu les premiers explorateurs et les chercheurs d’or qui ont sillonné cette vaste contrée sauvage il n’y a pas si longtemps que cela. Ceux d’aujourd’hui sont mieux équipés, et utilisent de gros 4×4 ou des hydravions pour se rendre en forêt. Sur la route qui mène à Miles Canyon, un superbe défilé rocheux creusé par l’impétueuse rivière Yukon, on voit décoller ces hydravions sur le lac Schwatka, et lorsqu’ils sont dans le ciel, on dirait de gros insectes, comparés aux immensités qu’ils survolent.

Rivière Yukon à Miles Canyon
Touriste américain
A Whitehorse
Gold Rush Inn
Rivière Yukon vers Whitehorse
Hydravion sur le lac Schwatka

Dawson city entretient le mythe du chercheur d’or

C’est aussi par la voie des airs qu’il faut se rendre à Dawson City, première étape vers le Grand Nord. 650 km par la route, à doubler de gros trucks interminables, c’est long et fastidieux…Vue du ciel, la virginité et la beauté du Yukon apparaît dans toute sa splendeur, surtout en septembre-octobre, lorsque la forêt se teinte des couleurs de l’automne indien. Les pins aux troncs élancés et à la ramure peu touffue sont comme des pinceaux qui auraient pris les couleurs des essences de feuillus qui les entourent, du jaune clair au rouge foncé. Avec le vert des conifères, cela donne un tissu écossais dont les taches noires sont les innombrables lacs aux eaux sombres. Dès que l’on aperçoit les premières dragues, avec leur bras articulé qui rejette les gravats filtrés, Dawson City apparaît. Cette ville minière a poussé comme un champignon à la fin du 19e siècle lorsqu’une poignée de mineurs a découvert des filons d’or dans une rivière du coin, la Klondike river. Ce fut la célèbre « Klondike gold rush », la plus grande ruée vers l’or de tous les temps, qui attira ici des milliers de prospecteurs et d’aventuriers, avec la folle espérance de faire fortune. Mais il fallait braver la faim et le froid (il fait fréquemment – 50° C l’hiver ) et si certains découvrirent des filons, beaucoup ne trouvèrent que la mort. C’est cette incroyable aventure humaine qui est retracée dans le musée de Dawson, truffé d’objets de l’époque, de photos et d’anecdotes. On repense au film « La Ruée de l’Or » de Chaplin, lorsque Charlot était obligé de manger le cuir de ses chaussures : ce n’était pas que de la fiction ! Dawson a toujours des trottoirs en bois qui longent de larges rues en terre battue, des maisons en bois et des commerces aux façades dignes d’un décor de western, ainsi qu’un bateau à vapeur, en cale sèche. Et il y a un saloon, bien sûr : le « Diamond Tooth Gerties » est une institution, et chaque soir s’y retrouvent les touristes et les habitants de Dawson, qui ne se lassent pas d’assister au spectacle de french cancan. A moins qu’ils ne viennent que pour boire une bière et jouer leur salaire (ou leur retraite) aux machines à sous…  Ce qui est drôle, c’est que certains mineurs règlent leurs dettes en pépites d’or ! Car on trouve toujours de l’or à Dawson. Evidemment,  les mineurs actuels utilisent des moyens plus modernes que la traditionnelle batée, mais les touristes peuvent apprendre à la manier, pour de vrai : on vous met une poignée de sable aurifère dans la bassine, et vous devez la secouer dans l’eau pour arriver à faire tomber le sable et garder l’or au fond. Chacun repart fièrement avec sa petite fiole remplie de paillettes d’or. Pas de quoi devenir riche, mais on ressent un peu la fièvre du chercheur d’or, et c’est une expérience très excitante !

La rivière Yukon à Dawson
Dawson city
Le vapeur Keno à Dawson
Maison de Jack London à Dawson
Cabane à nourriture au musée de Dawson
Vieille loco au musée de Dawson
Le Diamond Tooth Gerties
French cancan au Diamond Tooth Gerties
Machines à sous au Diamond Tooth Gerties
Orpaillage touristique
Paillettes d’or
Pépites d’or

En route vers le cercle polaire…

Parmi les nombreuses excursions possibles à partir de Dawson, la plus belle est de suivre la Dempster Highway, la route qui conduit au-delà du cercle polaire jusqu’à Inuvik, un village d’Esquimaux. Dès les premiers kilomètres sur la piste de terre, les paysages deviennent somptueux. Progressivement, à mesure que l’on remonte vers le nord, la forêt de conifères laisse place à une toundra vallonnée, irriguée de rivières et de lacs, et colorée par les tapis rose ou mauves d’épilobes, cette jolie fleur emblème du Yukon. Si vous décidez de vous promener à pieds, ne vous fiez pas à la beauté virginale des lieux. La nature a ses habitants, et ce sont des bêtes sauvages. Les caribous ou les orignaux, même s’ils sont très impressionnants avec leur immense ramure, ne sont pas dangereux. Mais le grizzli ou l’ours noir sont des bêtes imprévisibles et très véloces. Mieux vaut rester dans sa voiture et les observer aux jumelles. Sur les pentes montagneuses aux cimes enneigées, les ondées sont fréquentes, et déclenchent des arcs en ciel éclatants. Si le jour, l’azur est fréquemment strié d’arcs multicolores, la nuit, qui est bien courte à ces latitudes, le ciel s’éclaire parfois d’aurores boréales. Cela vaut la peine de veiller jusqu’à la nuit noire, pour voir apparaître ces draperies célestes qui se déforment au gré des vents solaires, en prenant des teintes du vert au rouge. Ce phénomène féerique est si hallucinant que certains prétendent qu’on peut entendre les aurores boréales…

Dempster highway
Dempster highway
Dempster highway
Vue depuis la Dempster highway
Sentier au pays des ours
Biche de wapiti
Sur la Dempster Highway

Mais les gens d’ici racontent tellement d’histoires ! Qu’ils soient descendants de trappeurs, d’aventuriers, d’indiens, ou simples immigrants, les habitants du Yukon ont tous un caractère bien trempé pour vivre dans ce pays, surtout durant le long hiver. Alors on rencontre parfois des personnages étonnants comme un sosie d’Elvis Presley, ou un type qui a bricolé sa propre station de radio et qui est l’homme le plus tatoué du Yukon, ou encore ce barman du Downtown Hotel, à Dawson, qui propose à ses clients de boire le « sourtoe cocktail », un tire-boyau dans lequel macère un orteil humain… Mais sous la rudesse couve la gentillesse et l’hospitalité est une règle, au Yukon. Surtout de la part des francophones qui sont très actifs et particulièrement accueillants envers les français. Ils ont d’ailleurs édité une brochure qui recense tous les services (hôtels, restaurants, commerces…) où l’on parle français. L’idéal est de commencer son voyage en les rencontrant à Whitehorse (qui est jumelé avec Lancieux, en Bretagne) au Centre de la Francophonie. Tous les vendredi il y a des soupers-rencontres, et fin août, ils y organisent des épluchettes de blé d’Inde (littéralement enlever les feuilles aux épis de maïs), soirées animées où l’on joue, chante, danse autour d’un barbecue, et où l’on placotte (discute) en français. Certains vous inviteront peut-être dans leur cabane d’été au bord du lac Tagish, à une demie-heure de voiture de Whitehorse, sur lequel vous irez pêcher le saumon rouge et l’ombre arctique. De là, vous ne serez pas loin de Carcross, mignonne cité construite autour de sa gare, jadis florissante, un peu ville-fantôme aujourd’hui. Il faut rentrer dans son magasin général, l’un des plus vieux du Yukon, restituant parfaitement l’ambiance des entrepôts qui équipaient et alimentaient les aventuriers en quête d’or dans la région. Ceux-ci ont dû être fascinés par la beauté d’un lac tout proche, le lac Emeraude, dont la couleur irréelle des eaux, faisant croire qu’elles recouvrent un tapis d’émeraudes, ne pouvait qu’attiser l’imagination de leurs esprits avides de richesses.

Un des sosies d’Elvis
L’homme le plus tatoué du Yukon est aussi chasseur d’orignal
Auberge vers Carcross
A Carcross
Magasin à Carcross
Quad vers le lac Tagish
Canoë au lac Tagish
Le lac Tagish
Le lac Emeraude

…ou bienvenue en Alaska !

Si l’envie vous prend d’aller faire un petit tour en Alaska, rien de plus facile, il suffit d’emprunter l’Alaska Highway, et c’est tout droit ! La première étape sera Haines Junction, ville carrefour située au bord du parc national Kluane, sans doute l’un des plus beaux du Canada. Ici plus qu’ailleurs la nature est intacte, et les paysages sont rendus somptueux par une chaîne de montagnes constamment enneigée, dont le Mont Logan, culminant à 6000 m, est le sommet le plus élevé du Canada. C’est à ses pieds que s’étire en forme de « S » l’immense glacier Kaskawulsh, majestueux fleuve de glace alimentant le lac Kluane, qui avec ses 600 km de long, est le plus grand du Yukon. Une agence locale propose de survoler ces « champs de glace » en hélicoptère : c’est un must ! De là-haut, on apprécie beaucoup plus de ces fabuleux paysages, et l’hélico vole suffisamment bas pour distinguer les orignaux et les ours ! Retour sur l’Alaska Highway. A mesure que l’on se rapproche des montagnes de l’Alaska, la végétation se raréfie jusqu’à devenir une austère toundra rocailleuse. Après la frontière canadienne, il faut encore traverser un no man’s land (qui n’a jamais aussi bien porté son nom !), avant d’arriver à la frontière américaine. Beaucoup de touristes ne viennent ici que pour se faire prendre en photo devant le gigantesque panneau : « Welcome to Alaska ». Il est vrai qu’on se pincerait pour y croire…

Alaska Highway
Pine Lake, vers Haines Junction
Pine Lake, vers Haines Junction
Paysage vers Haines Junction
Rivière vue depuis l’Alaska Highway
Ranger du Kluane park
En hélico au-dessus du Kluane park
Glacier Kaskawulsh, dans le Kluane park
Au Kluane park
Au Kluane park
Frontière avec l’Alaska

Muktuk Adventures

A une vingtaine de kms au nord de Whitehorse, ce « ranch récréatif » situé au bord de la rivière Takhini permet de découvrir la nature sauvage du Yukon en toute sécurité. Vous y serez accueillis par une meute de 60 chiens de traîneaux, qui l’été peuvent vous accompagner dans vos treks. Lorsque j’y suis passé, il y en a même qui traînaient des quads ! Vous pourrez faire du canoë, accompagné ou pas, à la journée ou en itinérance, avec de 1 à 9 nuits de camping. Fait également location de chalets en bois. https://muktuk.com/

PRATIQUE

Y aller : Air Canada propose des vols Paris-Whitehorse, avec deux correspondances (et 32 h de trajet !) à partir de 600 €. Mais il faut s’arrêter à Montréal et passer la nuit à Vancouver. Vous pouvez aussi aller à Londres et prendre un vol Londres-Vancouver et Vancouver-Whitehorse dans la même journée. https://www.aircanada.com/fr/fr/aco/home.html#/ Enfin, il existe un vol Lufthansa Francfort-Whitehorse à partir de 700 €.

Bonnes adresses :

Inn on the Lake, à Whitehorse
Inn on the Lake, Whitehorse
Préparation du saumon pêché au Dalton Trail Lodge

A ramener : saumon sauvage fumé, pierres semi-précieuses, artisanat autochtone

A savoir :

  • meilleure période : de mai à fin septembre
  • décalage horaire : – 9 h
  • monnaie : le dollar canadien, cartes bancaires acceptées 

Se renseigner :

https://www.authentikcanada.com/fr-fr/tourisme/office-tourisme-canada

https://www.travelyukon.com/fr

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